Cette fable transmise de génération en génération chez les elfes est très ancienne. Il existe de nombreuses variations de cette histoire, mais en voici la version la plus courante :
Un Cerf vivait, fort content de lui-même,
Certain qu’en grâce il n’avait point d’égal.
Sa démarche était noble, son port royal,
Comme étant l’élu d’un antique poème.
Un jour, tandis que le soir tombait
Il vit surgir au cœur d’un vieux bosquet
Une nuée dorée de milles lucioles,
Semant la nuit d’étoiles frivoles.
“Ses joyaux sont dignes de ma personne!”
Pensa-t-il devant ces astres miniatures.
“Par tous moyens j’en ferai la capture
Et qu’ainsi brille de mille feux ma couronne.”
À l’aube, il chercha un pin suintant de résine,
S’y frotta les bois avec zèle, sans lésine
Puis guetta immobile dans les fourrés
Que les lueurs se remirent à danser
Elles vinrent. Croyant ses bois un simple arbuste,
Elles s’y posèrent, toutes confiantes, par centaines,
Mais figèrent soudain, prises au piège robuste
Dans la sève gluante elles devinrent siennes.
Les lucioles affolées furent prises d’effroi
Tandis que le Cerf paradait en roi,
Foulant la mousse verte, tout en admirant
Son galant reflet dans l’eau de l’étang
Un Loup, tapi dans l’ombre, le scrutait
Un sourire se dessina sur ses crocs affûtés :
“Un Cerf, tout brillant, mais si bien trahi,
Ne restera pas longtemps à l’abri.”
le pauvre hère s’élança pour fuir le drame
Mais en vain, le Loup le saisissa net.
Le roi Cerf mourut dans un dernier brame
Et disparu englouti par la bête.
L’excès de gloire n’est qu’un leurre habile,
Il éblouit et ramollit l’esprit.
L’orgueil construit des couronnes fragiles,
Et la vanité nous livre à l’ennemi.