Arrivée du Rose-Marie

Contexte

Les hommes et les femmes qui débarquèrent en 309 AB venaient de Madhur, un autre continent situé quelque part au nord-ouest de Grimm. Cette migration fut motivée en premier lieu par une guerre qui faisait rage là-bas entre différents clans belliqueux. Par ailleurs, il semblerait que l’oracle Ogma, dont on sait aujourd’hui peu de choses, ait eu des visions d’une terre promise, annonciatrice d’un avenir radieux et prospère à quiconque saurait la trouver. C’est donc sans indications précises que plusieurs expéditions furent envoyées à la recherche de cette terre. Nombre d’entre elles revinrent bredouilles, d’autres ne rentrèrent jamais.

Le Rose-Marie fut construit par les meilleurs architectes navals et charpentiers de leur génération, conçu à la fois pour supporter de longs voyages et pour honorer les esprits marins par sa magnificence. Le navire est reconnaissable à sa figure de proue représentant deux sœurs : Rose tournée vers bâbord et Marie vers tribord, guettant ensemble les flots. Le capitaine Loharn, du clan Aulvarn, dirigeait la flotte, composée de deux autres navires plus petits : la Godett et la Jouvenz.

À cette époque, les elfes continuaient de se développer sur le continent de Grimm. De plus en plus de tribus rejoignaient la Fédération, formant ainsi un peuple plus structuré, uni sous l’autorité du Sénat. Cependant, depuis la Déclaration du Droit Naturel et les révélations du Massacre du Bosquet, de nouvelles valeurs morales venaient troubler l’économie et les traditions aylonael, notamment concernant la question de l’esclavage. À la suite des révoltes, bon nombre de leurs sujets asservis étaient devenus dissidents, et il devenait vain de leur trouver une quelconque utilité.

Déroulement

Après un voyage de plus de quarante jours, le Rose-Marie et sa flotte jetèrent l’ancre dans la baie d’Avel, au sud-ouest du continent de Grimm. Ce fut un jour de liesse pour les humains qui débarquèrent : après un périple éprouvant, marqué par de nombreux incidents et frôlant la mutinerie, ils étaient enfin convaincus d’avoir trouvé leur terre promise. C’était le début d’un nouveau départ pour leur peuple. Ils s’organisèrent rapidement pour construire des habitations, faisant de cet endroit leur nouveau foyer. Ils baptisèrent leur village côtier du nom de leur capitaine. Port-Loharn deviendra plus tard la capitale de Varn, l’État vassal nommé en l’honneur du clan Aulvarn.

Ils furent assez rapidement repérés par les elfes, qui commencèrent par les observer de loin, intrigués par ce peuple capable de traverser l’océan à bord de leurs « maisons flottantes ». Les elfes, en effet, n’avaient pas pour habitude de naviguer, les enseignements de leur déesse Gaela étant contraires à cette pratique. Malgré cela, les plus curieux d’entre eux s’aventurèrent à leur rencontre, ouvrant la voie au commerce. Une des ressources notables que les elfes cédèrent aux humains fut leurs esclaves. Durant la traversée, ils avaient subi de nombreuses pertes et manquaient cruellement de main-d’œuvre pour bâtir leur village et réparer leurs navires.

Le capitaine Loharn envisageait déjà le retour à Madhur, afin d’informer ceux qu’ils y avaient laissés que la terre promise s’appelait Grimm, et qu’il l’avait trouvée. Le Rose-Marie repartirait seul cette fois-ci. Comme de nombreux colons allaient rester sur place, le capitaine avait besoin de nouveaux membres pour compléter son équipage. C’est ainsi qu’il enseigna le métier de marin à des esclaves orcs, qu’il finit par affranchir avec le temps.

Les elfes locaux finirent par envoyer un messager à la Cité d’Albâtre pour annoncer la présence de ces nouveaux venus. Une délégation fut alors dépêchée afin de les rencontrer et de les accueillir officiellement sur le continent. Ne parlant pas la même langue, les premières communications furent compliquées. C’est d’ailleurs de ces premiers échanges que provient le terme dénélien. En effet, à force de se faire appeler denel, mot signifiant « étranger » en elfique, les humains finirent par adopter ce nom pour se désigner eux-mêmes en tant que nouveaux habitants de Grimm.

Impact

Le capitaine Loharn parvint manifestement à retrouver son chemin vers les rivages de Madhur, car quelques mois plus tard une flopée de navires vinrent accoster le continent de Grimm. En moins d’une année, l’entièreté de la côte des Brumes fut colonisée par les principaux clans dominants : Rudierne, Hevott, Osimor, Yrdote et bien sûr Aulvarn. Cette occupation rapide ne manqua pas de provoquer des conflits entre eux, ce qui mènera plus tard à de nombreuses guerres de territoire, prenant fin lors de la dernière bataille de Briggavel, remportée par Uthger d’Osimor. Les clans Osimor et Aulvarn, alliés durant les derniers combats, prêchèrent la parole d’Eognus : un nouveau dieu destiné à remplacer les anciens esprits traditionnels des humains. C’est ce dieu qui légitima la position d’Uthger en tant que haut-roi des dénéliens, et l’ensemble de ses sujets se convertirent à cette nouvelle religion.

Les échanges commerciaux se poursuivirent entre les humains et les elfes, entretenant un contact entre les communautés elfique et dénélienne, ce qui amena ces deux cultures à s’influencer l’une et l’autre. La langue des humains fut altérée au fil des décennies pour se rapprocher du parler des elfes, donnant naissance au denelaizh. Les elfes, eux, commencèrent à développer leur industrie navale, grâce aux connaissances partagées par les dénéliens. C’est ainsi qu’apparut leurs tristement célèbres « Sanglières », ces fameuses galères propulsées à la force des bras d’esclaves récalcitrants et de criminels. Mais ces nouveaux navires furent à double tranchant pour les aylonael : les mutineries et les abordages ennemis poussèrent beaucoup d’esclaves à gonfler les rangs de la piraterie qui commençait à alors sévir.

En bref, l’arrivée du Rose-Marie marqua le début de l’implantation humaine sur le continent, qui changea à jamais la face du monde de Grimm.