La Déclaration du Droit Naturel est un texte loi fondamental pour la société elfique, qui rend chaque elfe égal au regard de Gaela et du Sénat. Il fut ratifié en 519 AB lors d’un grand débat qui eut lieu au bosquet de Vardelidh, qui rassembla en grand nombre l’élite du peuple aylonael. L’objet principal de ces discussions était de redéfinir le statut de ceux que l’on appelait alors les vidzum, les elfes n’étant pas dotés d’une âme artistique. Le Droit Naturel eut pour effet d’affranchir les esclaves elfes et d’en faire des citoyens à part entière, le terme vidzum fut aboli et ils furent dès lors appelés les vardael.
Depuis des temps immémoriaux, il était coutume d’asservir les elfes considérés comme les moins capables d’honorer la déesse Gaela au travers de l’expression artistique. Le fruit de leur travail permettait aux elfes aylonael, ceux qui étaient bénis de créativité, de pouvoir se dédier corps et âme à leur art. Cette tradition séculaire était appliquée dans toutes les communautés elfes, bien qu’elle pouvait être appliquée de différentes manières selon les tribus. Cet état de fait faisaient rarement l’objet de contestation, les vidzum eux-mêmes se satisfaisaient de leur sort car ils remplissaient ainsi leur rôle pour la déesse Gaela. La réduction en esclavage d’autres races telles que les orcs, les nains, ou les petites-gens étaient même parfois mal reçue par les vidzum, qui se voyaient alors dépouillés de leur mission divine.
C’est au moment des premiers temps de la fédération elfique que les mentalités commencèrent à évoluer, et que ce système de caste fut remis en question. On peut attribuer ce changement au brassage culturel qui s’opéra alors, permettant aux vidzum de différentes tribus d’échanger leurs expériences, ou alors simplement à la volonté des elfes de laisser derrière eux leurs traditions afin de s’unir en tant que peuple dominant. Une nouvelle interprétation des enseignements de Gaela se répandit alors au sein des grandes tribus, créant dissensions et conflits. Afin de calmer cette discorde croissante, les représentants des tribus fédérées décidèrent d’organiser un grand débat public qui permettrait de créer un nouveau consensus concernant la nature des vidzum. Afin de permettre au plus grand nombre d’y assister, il fut décidé de tenir cette assemblée au bosquet de Vardalidh en raison de sa disposition et de sa grande taille.
Le congrès de Vardalidh convia de nombreux artistes, philosophes, prêtres, politiciens, marchands venant de toute part. Les débats étaient conduits à tour de rôle par les chefs des six grandes tribus Aduann, Garmutt, Markoll, Maneliel, Simpronna et Otomer. Malgré le fait que les vidzum étaient l’objet principal des discussions, ils ne furent pas autorisés à participer aux échanges : ils n’étaient pas encore citoyens.
De nombreux arguments furent avancés lors de ces joutes verbales concernant le bien-fondé d’une potentielle harmonisation des droits des elfes. Ceux qui étaient pour prônaient les bienfaits de l’union raciale, comme un prolongement logique de la fédération inter-tribus qui s’opérait déjà. Du côté de l’opposition, on mettait le doigt sur les conséquences néfastes de ce changement pour l’économie, qui alors profitait grandement de l’esclavagisme. Des paradigmes furent bousculés par de grandes remises en question, notamment sur la véritable nature de la créativité. L’art ayant sans cesse pour mission de se réinventer, les philosophes se butèrent sur l’exercice d’en faire une indiscutable définition. Hors si l’on ne pouvait pas définir clairement les critères constituant l’art, il était par conséquent impossible d’évaluer la créativité réelle des individus. Le fruit du travail des artisans vidzum fut alors réévalué et bien que les pièces exposées ne furent pas appréciées en tant qu’œuvres d’art, il fut reconnu un « potentiel artistique » pour certaines par les experts présents.
Ces délibérations, qui durèrent près de cinq jours sans interruption, aboutirent sur un compromis. Les vidzum furent reconnus en tant que membres de la société elfique, pas en tant qu’aylonael mais sous la forme d’un nouveau peuple : les vardael. Ils obtinrent de cette façon les mêmes droits que les aylonael au sein des tribus: comme par exemple les droits de posséder, de commercer et de prier. Les lois sur le Droit Naturel qui furent alors rédigées ouvrirent aux elfes vardael des possibilités nouvelles, bien qu’ils étaient toujours dans les faits considérés comme inférieurs car moins touchés par la grâce divine de Gaela.
Sur de nombreux plans, la Déclaration du Droit Naturel a eu des répercussions fondamentales sur la société elfique. Les plus immédiates furent d’ordre économique, car d’innombrables esclaves elfes ont été affranchis du jour au lendemain. Bien que nombre de vardael décidèrent de rester travailler pour leurs anciens maîtres contre salaire, certains au contraire prirent parti de leur liberté nouvellement acquise pour s’émanciper des aylonael. Les marchands d’esclaves se retrouvèrent privés d’une grande partie de leur marchandise, et seuls les plus avisés eurent le flair d’anticiper ce revirement en se fournissant en esclaves de race non elfe. La chasse et l’asservissement des orcs se multiplia fortement, créant de nouveaux modèles d’oppression plus agressifs qu’auparavant.
On observa aussi un changement d’ordre spirituel, en amenant une nouvelle interprétation des enseignements de la déesse Gaela. Une nouvelle reconnaissance se dessina pour les croyants vardael, car cette libération fut pour eux tout autant spirituelle que sociale.