Mort du Duc de Cardagnan

Il fut décidé que la rencontre se ferait dans l’enclave forestière d’Ercachant, une parcelle de Saûne qui avait d’ores et déjà été cédée aux elfes quelques années plus tôt. Ce territoire elfe, au milieu du royaume des humains, se voulait être une zone neutre pour mener les négociations. Jevo de Cardagnan s’y rendit avec une délégation, dans l’intention de négocier la libération des captifs sans provoquer un affront diplomatique, en proposant un transfert encadré par une autorité neutre et un effacement politique des responsabilités. En contrepartie, il était prêt à céder la portion de forêt contestée, tout en gardant un sentier de commerce sous le contrôle du duché.

Malheureusement, cet arrangement ne put jamais voir le jour. Alors que la médiation entre le duc et l’émissaire du Sénat était sur le point de commencer, Jevo fut frappé d’une flèche sortie de la canopée de la clairière aménagée. La panique s’empara de l’assemblée, les humains présents accusant les elfes de les avoir attirés dans un piège afin d’assassiner leur représentant. Certains d’entre eux affirmèrent avoir vu une main se lever dans les rangs elfiques peu de temps avant le coup fatal. Pourtant, les aylonael réfutèrent ces accusations, affirmant que cette attaque n’était pas de leur fait. À partir d’ici, les récits divergent : certains parlent d’un acte haineux d’un citoyen elfe suprémaciste isolé, d’autres encore d’un complot monté par une caste dénélienne qui ne voyait pas d’un bon œil la docilité de Jevo face aux affronts répétés des elfes. Ce qui est sûr, c’est que l’assassin ne fut jamais retrouvé, ni ses potentiels commanditaires.

Impact

La mort du duc Jevo de Cardagnan plongea le royaume de Saûne dans un deuil profond. Les cloches de la ville de Lenoïc sonnèrent bien avant l’arrivée de son corps. Son cercueil traversa les rues de la cité, acclamé en silence par les saûniens. Trois jours durant, son corps reposa dans la salle haute du château, veillé nuit et jour par la reine, ses proches, et ses anciens frères et sœurs d’armes. Il fut ensuite enterré dans la crypte royale, auprès du célèbre chevalier Gehartt, son ami le plus cher. Le deuil fit ensuite place à la colère, et la soif de vengeance se propagea comme une gangrène dans tout le royaume.
Du côté des elfes, le Sénat recommanda de garder le silence, espérant que ces tensions se résorbent d’elles-mêmes avec le temps. Cela n’empêcha pas certains dirigeants d’exprimer leurs condoléances au royaume de Saûne, sans pour autant reconnaître la responsabilité d’Aelom’Sehl dans ce fâcheux incident. Se préparant à l’inévitable, les troupes armées se mobilisèrent discrètement dans chaque camp. Les négociations territoriales cessèrent complètement, laissant place à des affrontements sporadiques visant à chasser les occupants aylonael du territoire dénélien. La reine Helma commença à négocier une alliance avec le roi Clodimar, afin qu’au moment venu, Larth et Saûne puissent faire front ensemble face aux elfes.

Avec le recul, on s’accorde à dire que l’assassinat de Jevo de Cardagnan fut le point de bascule qui précipita la Grande Guerre. La reine elle-même, qui se sentait coupable d’avoir livré le duc à la mort, dira de lui : « il est tombé pour une paix que plus personne n’avait la force de vouloir ».